Gatineau, 28 février 2023
Aux membres du conseil municipal de Gatineau,
La ville de Gatineau doit prendre des décisions bientôt dans le dossier d’un potentiel quartier général de police ainsi que pour l’avenir du site de l’aréna Guertin. Suite à une décision en assemblée avec ses membres, et en tant que regroupement d’organismes communautaires autonomes qui représente 105 organismes communautaires dans la région de l’Outaouais, la Table régionale des organismes communautaires autonomes de l’Outaouais (TROCAO) aimerait apporter un angle d’analyse résolument communautaire à ce dossier d’importance pour l’avenir de la ville de Gatineau, où on remet de l’avant l’importance de la participation citoyenne, de la vie démocratique, de l’expertise du communautaire et l’amélioration des conditions de vie de tous et toutes au sein de nos communautés .
Vivre la démocratie par la participation citoyenne et l’expertise du communautaire
Les organismes communautaires évoluent dans un écosystème dont l’objectif est de changer la société pour le mieux vivre ensemble, pour améliorer les conditions de vie de tous et toutes, particulièrement des personnes les plus vulnérables de notre société.
Parmi les principes indispensables en intervention communautaire, nous retrouvons l’appropriation du pouvoir d’agir des gens et des communautés, ce qui s’articule notamment via la participation citoyenne et la participation à la vie démocratique à tous les niveaux. C’est pourquoi, il va sans dire, qu’un processus de consultation citoyenne entourant l’avenir du site Guertin est une condition essentielle en démocratie et en développement territorial.
En ce sens, il est important d’impliquer et d’écouter TOUTES les personnes concernées par diverses problématiques dont ils et elles sont expert.e.s de par leur vécu, ainsi que dans le développement et l’amélioration de leurs milieux de vie.
Il en va de même pour la reconnaissance de l’expertise des organismes et des travailleuses et travailleurs du communautaire qui sont des acteurs terrains, près des personnes. Nous espérons fortement que les élu-es et nos partenaires institutionnels sauront nous reconnaître à notre juste valeur et non pas comme des gens à mobiliser uniquement en temps de crise, mais comme des parties prenantes qui bâtissent des communautés, qui rassemblent les gens et qui ont des expertises terrains et professionnelles qui méritent de faire partie des solutions, d’être consultés et écoutés lorsque des projets d’envergure comme celui concernant le site Guertin sont mis de l’avant.
Des organismes communautaires autonomes louangés mais dans un cycle abusif
Le dossier Guertin, et par la bande celui du quartier général de police, est intimement lié aux crises du logement, de l’itinérance, de l’inflation et de l’augmentation des inégalités sociales qui sévissent à Gatineau en ce moment. Personne ne semble le contredire, nos communautés dépendent énormément du rôle essentiel joué par les organismes communautaires autonomes de la région. Mais le soutien tarde à se faire sentir, et quand les actions ne suivent pas toujours les paroles, c’est une sorte de cycle d’abus.
Malheureusement, en ce qui a trait aux enjeux d’itinérance, ils ne se règleront pas par la simple proximité avec la police qui est déjà fréquemment présente à proximité des locaux des organismes communautaires en itinérance par exemple, mais plutôt par un investissement accru dans la prévention, l’accompagnement des personnes vulnérables, le renforcement des services sociaux publiques, les réseaux d’entraide soutenus par le communautaire et par des milieux de vie de qualité qui permettent aux gens de vivre dignement, et qui donnent des chances aux gens de se sortir de cycles de violences, traumas et de pauvreté auxquels ils font face. On parle encore ici de conditions gagnantes pour permettre l’appropriation du pouvoir individuel et collectif sur nos vies.
Quand nos gouvernements ne donnent pas aux organismes les moyens d’agir sur les conditions de vie de base des gens, comme se nourrir, vivre dans un logement décent, se vêtir et avoir un accès à des soins de santé, pour n’en nommer que quelques-uns, on plonge les gens dans un cycle abusif, sans les moyens de s’en sortir, alors que les solutions existent.
Avec toutes ces crises sociales qui sévissent actuellement, et puisque le communautaire joue un rôle comme un des derniers maillons du filet social et qu’il subit les effets d’une augmentation des besoins en dépannage alimentaire, d’une augmentation des populations sans domiciles fixes, d’une augmentation de la détresse et de la violence dans nos communautés, l’absence de considération pour les solutions que nous proposons, tout comme l’absence d’un financement suffisant se vit comme un cycle abusif. Qu’est-ce qu’on attend pour investir dans dans notre monde et notre avenir collectif?
Ça prend des solutions immédiates et multiples à nos crises sociales, des solutions à court et à long terme, et malheureusement un quartier général de police sur le site Guertin viendrait exacerber une situation déjà catastrophique sur le terrain, pour la population et pour les organismes communautaires.
Pourtant, et la mobilisation récente en fait foi, ça fait des années que la population propose des solutions toutes faites pour le site Guertin : des infrastructures pour le communautaire, du logement social, des services de proximité et une valorisation de nos espaces verts qui augmenteront la qualité de vie de tous et de toutes.
Il est important de consulter l’ensemble de la population et de s’appuyer sur l’expertise du communautaire et des personnes qui utilisent les services pour façonner l’avenir de nos communautés, et nous espérons que les élu.es et les travailleurs et travailleuses de la ville de Gatineau en prendront acte. La ville de Gatineau peut et doit agir par l’exemple en encourageant, entre autres, la participation citoyenne et la vie démocratique par des consultations publiques pour les développements de sites névralgiques comme le site Guertin.
Cordialement,
Martin Chartrand
Président du CA de la TROCAO